Avant de partir: Il faut acheter son entrée au parc et le TIMS (Treker Information Management System) à Katmandou ou Pokhara au "Nepal tourim board" avant de commencer le trek sous peine d'amende!
Jusqu'ici nos modestes randonnées nous avaient menées, pour moi en haut du "Piton de neiges" (à la Réunion pour les zoreilles): 3070 mètres, et pour nous deux au "Mont Cameroun" (au Cameroun donc): 4090 mètres. On passera sous silence le fameux "pic de Lauzerville" en face de chez nous qui culmine à... 210 mètres...
Fort de toute cette expérience, on a donc décider de se lancer dans l'aventure du tour des Anapurnas, sans guide ni porteur mais avec d'excellents compagnons de routes (pour reprendre la belle expression de Christelle et Thomas)! Pari risqué? Et bien pas du tout: on est pas les premiers à l'avoir fait et impossible de se perdre sur le chemin (sauf le fameux col à 5400 si la neige s'en mêle).
Le paradis des randonneurs: Contrairement à ce qu'on avait connu en Afrique où il fallait prévoir et porter ses provisions de nourriture et d'eau pour trois jours de rando (ce qui à l'époque m'avait valu un sac de plus de 20 kg, des crampes aux cuisses au bout de 2h de marche et "l'obligation" de demander au guide de porter mon sac...), ici il y a des fontaines et des ruisseaux en permanences pour remplir sa gourde (traité à la Micropur quand même), des restos, lodges et des échoppes toutes les 1h à 2h sur le trajet! On peut donc marcher à son rythme et s'arrêter quand on en a envie.
Pas la peine donc de charger trop son sac. Bon OK, on avait quand même pris la tente (qui est toujours aussi bien pliée qu'au départ, on a pas eu l'occaz de la sortir), un sac de couchage chacun (changé en cours de route, merci Christophe!), tapis de sol, serviettes, bouffe lyophilisée... On s'est dit: on est jamais trop prudent! Ce qui faisait un joli 12kg pour madame et 14kg pour monsieur... Et on s'est (presque) pas plaint! En même temps quand on voit comment sont chargés les sherpas, on préfère être avec nos "petits" sacs!
Et le malheur des uns faisant le bonheur des autres: après le tragique tremblement de terre d'avril dernier pas beaucoup de touristes malgré la haute saison, ce qui signifie par contre plus de tranquillité pour nous.
Ci-dessous le récit de notre parcours:
Besisahar - Manang
On a quand même réussi à trouver un bus qui nous a conduit à bon port, ou plutôt au bon check point d'entrée, et ce avec le repas du midi offert: Dal Bhat à volonté pour tout le monde!
C'est d'ailleurs là qu'on a découvert que ce plat est servi en quantité, et on vient même vous resservir! C'est devenu notre déjeuner quotidien tout au long du trek!
On est donc arrivé à Besisahar en milieu d'aprem et après avoir fait valider nos permis de trek on a commencé notre périple pédestre dont voici les étapes:
Jour 1: Besisahar (820m) - Bhulbhule (840m) : 3h de marche
Jour 2: Bhulbhule (840m) - Jagat (1300m) :7h30 de marche
Jour 3: Jagat (1300m) - Bagarchap (2160m): 7h de marche
Jour 4: Bagarchap (2160m) - Dhikur Pokhari (3240m): 8h de marche
Jour 5: Dhikur Pokhari (3240m) - Bhraga (3450m): 7h de marche
Jour 6: Bhraga (3450m) - Manang (3540m): 30mn de marche + jour d'acclimatation
Les premiers jours les paysages étaient verdoyant avec des cultures de riz en Terrace. Rarement on a vu un vert aussi... vert!
Il y a une route, non: une piste défoncée, qui monte depuis Besisahar jusqu'à Manang. On est de temps en temps obligé de l'emprunter mais la grande majorité du trajet se fait sur un sentier, ce qui est quand même plus agréable.
Après avoir visité un temple et fait quelques photos avec des jeunes moines portant des bonnets de rappeurs, nous nous sommes attaqués à la 5ème journée qui proposait un passage assez... raide! La montée jusqu'à Ngawal est un enchainement de lacets. Et quand on croit être enfin arrivé et ben non, c'est pas fini (référence au cabanon de ravitaillement au milieu de la côte mais fermé...). On a dépassé quelques russes qui suaient leur vodka, et au sommet Adèle cherchait de la Ventoline... Point de Ventoline, mais un Snikers a bizarrement eu le même effet!
Il est vivement conseillé de faire une journée d'acclimatation à Manang. Ca tombait bien on commençait à en avoir plein les jambes!
On y a fait la rencontre de Christelle, Thomas et Christophe, trois français géniaux, avec qui on a partagé un bon bout de chemin. C'est d'ailleurs eux qui nous ont motivés à aller faire un tour du côté du lac Tilicho.
Tous les jours à 15h il y a une séance de sensibilisation sur le MAM (Mal Aigu des Montagnes); c'est un coup à vous foutre une grosse angoisse: Œdèmes pulmonaires, cérébraux, vomissements, maux de tête... Du coup je n'ai pas traduit la moitié des explications à Adèle! "Qu'est-ce qu'ils disent?" "T'inquiète, si on a de l'ibuprofène on est sauvé"... C'est un coup à croire que vous allez devoir être évacué à chaque fois que vous toussez!
On a eu droit à la mesure de notre pouls et du taux d'oxygène dans le sang: on m'a dit que j'étais en excellente santé, mais le mec a pas bien du regarder ma tête car une migraine ophtalmique commençait à me faire dire qu'il avait pas encore parlé d'Œdème du noeunoeuille...
Lac Tilicho: l'un des plus hauts lac du monde
Jour 8: Tilicho base camp (4165m) - Lac Tilicho (5000m) AR: 4h30 de marche
Jour 9: Tilicho base camp (4165m) - Manang (3540m): 5h de marche
Seul nous ne l'aurions pas fait. Pourquoi? Quand des porteurs vous disent qu'il n'est pas question pour eux d'y aller et sachant que le Yeti n'existe pas, on se pose des questions! Pareil quand un guide vous dit que le chemin n'est pas dur mais... aventureux!
On a suivi l'expédition menée par Christophe en se donnant la possibilité de faire demi-tour si on ne le sentait pas. Finalement on a pas fait demi tour et on a bien fait: ce lac est magique!
Et une partie du chemin aussi: de la pierraille, large de 20cm parfois, sur un flanc de pierrailles avec des bouctintins au dessus qui peuvent vous envoyer des rochers... On a eu les fesses qui ont fait bravo quelques fois et on a évité de se demander ce qui pourrait se passer si on glissait!
Du camp de base au lac: pareil que le jour 5, et sur 3h de montée! Mais le bleu turquoise du lac, d'un bleu... tellement bleu!, (et le chocolat chaud) est une récompense qui vaut bien tout l'oxygène qu'on a brulé dans notre effort!
Manang - Jomson
Jour 11: Manang (3540m) - Letdar (4200m): 4h30 de marche
Jour 12: Letdar (4200m) - Thorong High Camp (4850m): 4h de marche
Jour 13: Thorong High Camp (4850m) - Muktinath (3800m): 8h de marche
Jour 14: Muktinath (3800m) - Jomson (2720m): 7h de marche
Le mauvais temps s'annonçant, on a préféré retourner à Manang pour être bien installés (le petit crumble aux pommes a aussi pesé dans la balance) plutôt que perché à plus de 4000m au milieu des montagnes. On a donc eu droit à un second jour de repos, mais notre ami Christophe a du se résoudre à prendre une jeep pour redescendre à Besisahar (12h de trajet quand même) à cause de son avion qui n'avait pas forcément prévu de l'attendre s'il arrivait en retard!
J'ai succombé à l'appel du cinéma: une grange de projection à 3500m d'altitude ça court pas les rues! Il y avait même thé et popcorn inclus! Et le choix du film était très judicieux: "Into Thin Air", ou l'histoire vraie d'une ascension de l'Everest en 1996 qui tourne au drame. De quoi être bien gonflé à bloc avant d'attaquer le passage du col...
La météo nous annonçant une fenêtre pour le passage du col deux jours plus tard, on a quitté Manang et continué à gagner de l'altitude. Le lendemain matin à Ledar il y avait une fine pellicule de neige sur le chemin.
On a décidé de loger au Thorong high camp pour réduire le chemin à faire le lendemain matin (4900 mètres quand même, on a dormi plus haut que le Mont Blanc). Mais ce lodge, en plus d'être cher car pas de concurrent à cette altitude, n'est pas chauffé! Et oui, pas de forêt ni de bouse de vache séchée non plus! Avec une petite tempête de neige qui s'est levée l'après midi et qui a durée une bonne partie de la nuit, on a joué des grelots! Même une soupe chaude ne le reste pas très longtemps quand il fait 5°C dans le le salon...
Pas de problème particulier durant la nuit si ce n'est se réveiller en cherchant son souffle quelques fois (Œdème pulmonaire qui se déclencherait???). Adèle a profité pleinement de son nouveau duvet de compétition.
Lever 4h, ciel magnifiquement étoilé, couche de neige d'environ 4cm, on enfile 4 couches de vêtement (T-shirt thermique, chemise, polaire, coupe vent; ce qui fait qu'on porte un sac quasi vide!) ptit dej express, on casse la glace du réservoir d'eau pour remplir les gourdes et c'est parti pour le passage tant attendu!
On avait décidé de suivre un groupe d'israélienne avec un guide, mais leur rythme était trop lent (qui a dit qu'on était des machines déjà?) et le chemin a déjà été tracé par des lèves tôt. 1h plus tard elles nous re-dépassent... Mais à cheval! C'est plus ce que c'était le Mossad...
Après 3h de montée et un magnifique levé de soleil: le fameux Thorong La Pass: 5416 mètres! On a faillit perdre nos doigts mais ça valait le coup: une vue mes amis! On a bien fait d'attendre une journée à Manang. Car ceux passé la veille l'ont fait sous la neige, et sachant que l'an passé plus de 30 personnes sont mortes sur ce col dans une tempête de neige, ça pousse à écouter les prévisions d'Evelyne d'Héliat!
La descente qui s'en est suivi a été bien douloureuse pour nos petits genoux: -1700m de dénivelé à avaler. Mais le burger proposé par le "Bob Marley Guest house" nous a vite fait oublié que nos ménisques criaient à l'aide.
Pour rallier Jomson on est passé dans le lit d'une grosse rivière où un monsieur nous a dit: "pas de vent aujourd'hui"! Soit il s'est trompé de mot et il voulait dire "pluie" soit il s'est foutu de nous! Ou je n'ose pas imaginer ce que ça donne quand il considère que ça souffle. Car on arrivait pas à marcher droit quand même!
Jomson - Nayapul
Jour 16: Kalopani (2535m) - Tatopani (1200m): 7h de marche
Jour 17: Tatopani (1200m) - Ghorepani (2870m): 7h de marche
Jour 18: Ghorepani (2870m) - Nayapul (1070m): 7h de marche
On a quitté de nos compagnons de rando et décidé de continuer à marcher jusqu'au bout du trek. On a un peu forcé le pas sur cette dernière partie.
On a traversé des champs de pommiers pommés, des champs de cannabis dont les plants atteignaient allègrement les 2m de haut. Mais rassurez vous, on y a (presque) pas touché!
Tatopani est réputé pour ses sources d'eau chaude, et il faut avouer qu'après une grosse journée de rando ça fait du bien de cuire un peu dans de l'eau à plus de 40°C! Adèle nous a refait le coup du presque malaise vagal du à la chaleur. Mais j'avais pas de Twix pour la soigner...
C'est ici aussi qu'on a rencontré un autre très sympathique français: Damien de Montpel avec qui on a partagé une autre partie du voyage.
Une des plus dures journée de toute la rando est certainement celle menant de Tatopani à Ghorepani: 1700m de dénivelés positives, uniquement des marches... On était bien content d'avoir des bâtons!
Lendemain matin départ à 5h pour monter sur Punhill à 3200 mètres pour admirer le lever du soleil sur l'un des plus beaux panoramas des Annapurnas: Annapurnas I, Sud, III... Je savais même pas qu'il y en avait autant, ils se sont pas foulés pour les noms!
Puis redescente et la aussi les genoux nous ont rappelés qu'ils ont une rotule, des ligaments... Quand le terrain est devenu plus doux, on a mis le mode turbo; et oui, le lendemain c'est jour de fête dans le pays et il parait que les bus sont limites-limites pour ce soir!
Coup de bol, à peine on atteint la route qu'un bus arrive et nous embarque pour Pokhara!
Verdict
Je tiens à féliciter madame qui s'est débrouillée comme un chef (une chef?) et qui ne s'est (presque) pas plaint!
On a aussi gagné une bataille contre les ptits bobos:
- Adèle 1 / Ampoule 1: Pas d'éclairage nocturne cette fois, mais un bon coup de mercurochrome (le pansement des héros) et roule ma poule!
- Tom 1 / Campes 0: ma crainte principale au moment d'aborder le trek. Mais 7kg en moins ont pesés dans la balance, mes jambes n'avaient l'impression que de porter 7kg de sac par rapport au début de notre tour du monde! Et on avait aussi une potion magique (certes à l'odeur d'urine) pour les parties ardues!
On en a pris plein les mirettes, les paysages changent en permanence: si vous aimez la rando, ce trek c'est du bonheur en bar! Un peu comme les Snikers au final!